LES CÉLÉBRATIONS DE BOURGOGNE

1865 ● Naissance de Louis Charbonneau, romancier

Louis Charbonneau est né le 18 août 1865 à Moulins-Engilbert (Nièvre) d’un père tailleur d’habit et d’une mère couturière. Dans son ouvrage Jean Rouquier, sorte de biographie romancée, il évoque de sa jeunesse. Il entend son père lui raconter des histoires des pays « pu loin que l’canton ben sûr » où la terre donne tout « sans ran y faire ».  De quoi susciter des rêves de voyage. Dans l’immédiat, Louis fait ses études classiques au petit séminaire de Nevers. Il lit la Vie des saints à Bernadette Soubirous ; il rappellera plus tard qu’elle était une « si jolie brunette ». Il va ensuite faire son service militaire en bordure du Sahara tunisien pour surveiller les Touaregs. « Las, désabusé et même aigri par cinq ans de service militaire », il va courir l’Afrique en indépendant. Au Gabon d’abord où il sera garçon de café, prospecteur, il fait des levées topographiques qu’il présente à Savorgnan de Brazza. Elles lui attirent l’estime de l’explorateur qui veut le prendre comme collaborateur ; Louis refuse. Il parcourt l’arrière pays du Cameroun, la Guinée espagnole, revient au Gabon où il fait la connaissance d’un prospecteur sud–africain qui l’initie à la géologie. Fin 1893, il rentre en Europe pour monter une filature. À Gand, il rencontre une dentelière, Madeleine de Naet, qu’il l’épouse en 1894. En 1896, il revient au Gabon et s’engage à la Compagnie du British Congo. Il effectue plusieurs missions dans la région du Mayumbe. Au cours de ces périples, il rencontre une Africaine, Mambu, qu’il célèbrera plus tard dans son ouvrage : Mambu et son amour. À l’automne 1908, il s’installe au Mayumbe belge et devient planteur indépendant. Il entretient les plantations de cacaoyers avec l’aide du demi-frère de Mambu qui était décédée en 1906.

Charbonneau est alors chef d’une maison prospère et il souhaite retourner quelques temps en Belgique, peu avant la première guerre mondiale. Il retrouve son épouse pour plus longtemps que prévu par suite de la guerre. Il ne revient au Mayumbe qu’en 1920 pour constater que la forêt qu’il y avait vaincue « a pris sa revanche ». Il tente un « ultime effort » en regagnant les sources du Chiloango mais tout est déjà « concédé » à d’autres. Vaincu, ruiné, il renonce et rentre à Paris en 1922. Il va alors faire tous les métiers comme : poinçonneur de tickets de métro, « pigiste » au Quotidien, caissier dans une banque. Charbonneau se met à rédiger un roman à partir des notes qu’il a consignées dans des carnets pendant toute sa vie de « baroudeur ». Il l’apporte à Raymond Escholier qui raconte : « Mon gentilhomme de fortune parti, j’ouvris le paquet qu’il me laissait. Deux gros cahiers d’une écriture serrée… Je me souviens encore avec émotion de ce soir d’été où je lus d’un trait les deux gros cahiers… Une âme vivait entre ces pages… celle de la jeune Mambu…. Mambu la petite Négresse qui civilisa un Blanc… ». Tout va très vite. Colette est conquise et Mambu et son amour  paraît dans la collection dont elle a la responsabilité chez Ferenczi, avec une préface de Raymond Escholier, en 1924. Le roman de Charbonneau obtient l’année suivante le Grand Prix de littérature coloniale. Son patron banquier le reconnait dans le personnage de Libono ; il triple son salaire et lui fait participer à une opération financière qui le remet à flot après ses déboires africains. Louis Charbonneau allait donner ensuite d’autres romans édités toujours chez Ferenczi : Fièvre d’Afrique (1926), Azizé (1928), l’Orchidée noire (1928), Jean Rouquier (1930). Son éditeur ne put publier son dernier roman, Mayumbé, par suite de difficultés financières.

Son épouse ne se plaisant plus à Paris, les Charboneau quittent la ville en 1936 et s’installent à Gand. Malade depuis longtemps, elle meurt en 1944. Charbonneau désormais seul va écrire sans relâche. Il romance notamment le récit de son mariage de 1894 sous le titre de Minne Water (Lac d’amour), « inachevé ou partiellement égaré ». Dans le courant de 1948, il vient s’établir à Schaerbeek, non loin de la Gare du Nord de Bruxelles. Il décède le 15 janvier 1951, bien oublié des Bourguignons. Les Belges au moment de son décès publièrent quelques articles sur ce romancier original.

Mais plus de cinquante ans après son décès quasi solitaire, Roger Little, dirigeant la collection « Autrement Mêmes » aux Éditions l’Harmattan a souhaité rééditer ou éditer Louis Charbonneau. C’est ainsi que sont récemment parus ses principaux ouvrages et des inédits.

 

 

J.M. Jadot, « Louis Charbonneau (1865-1951), un romancier français du Mayumbe belge », Bulletin des séances, Académie royale des sciences coloniales, n.S. III, 4 (1957) p. 774-795. Guy Thuillier : « Louis Charbonneau » in Les auteurs nivernais de 1915 à 2005. Bibliothèque municipale de Nevers et Société Académique du Nivernais. Catalogue exposition B.M. de Nevers 15 novembre - 6 décembre 2006 (VI-186p.). Notice p. 25.