Né le 30 septembre 1886 à Bellechaume (Yonne), Gaston Ramon passe sa première enfance dans son village natal chez sa grand-mère, puis rejoint la boulangerie familiale à Sens où il fréquente l’école communale et le lycée. Il prépare le concours d’entrée à l’Ecole vétérinaire d’Alfort où il entre en 1906. Bon élève, il attire l’attention d’Henri Vallée, professeur de maladies infectieuses, qui l’introduit auprès d’Emile Roux, directeur de l’Institut Pasteur, alors à la recherche d’un jeune vétérinaire pour préparer le sérum antidiphtérique. Ramon saute sur cette opportunité. Le voici à l’Institut Pasteur et… à la tête de 300 chevaux qu’il immunise, saigne, dont il recueille les sérums et teste leurs valeurs pour soigner des enfants atteints de diphtérie, maladie qui tue le plus souvent et pour laquelle la sérothérapie, à l’époque, est l’unique traitement médical efficace. La guerre éclate, Ramon continue la production de sérum antidiphtérique et ajoute l’antitétanique destiné à prévenir cette maladie mortelle, fréquente chez les blessés de guerre. Il livre six millions de doses pendant cette période !
Les antisérums contiennent des substances pouvant annihiler les toxines de certains organismes pathogènes, mais, à l’époque, on ignore leur nature et on ne peut les doser que par des méthodes in vivo lourdes et coûteuses. Ramon travaille principalement les antisérums diphtériques de cheval et découvre (1922) que l’on peut les doser en étudiant leur floculation dans le mélange sérum antidiphtérique-toxine diphtérique. Il mesure la qualité de ses produits à chaque saignée avec sa nouvelle méthode in vitro, simple et rapide. Le problème de l’immunisation des chevaux reste à trouver, car on ne possède pas de méthode fiable d’atténuation de la toxine diphtérique. Ramon découvre les anatoxines (1923) en chauffant les toxines en présence de formol. Bon immunogène mais peu toxique, il les emploie sur ces chevaux producteurs de sérums puis sur… lui-même, enfin sur ses amis et leurs enfants. Les anatoxines sont alors utilisées, avec grand succès, pour vacciner les hommes (et les animaux, contre le tétanos). Mais les chevaux produisent parfois peu d’antitoxines ! Ramon observe que ceux qui ont une inflammation au point d’inoculation de la toxine produisent plus d’antitoxines que la moyenne des autres : il découvre ainsi les adjuvants de l’immunité (1924). Un problème inattendu apparaît : les injections multiples des divers nouveaux vaccins sont matériellement difficiles à réaliser et mal perçues par la population à vacciner. Ramon constate que l’association de plusieurs vaccins peut induire de bonnes réponses immunes pour chaque vaccin : les vaccinations associées sont nées (1926).
Ramon occupera avec distinction de hautes fonctions : directeur de l’Institut Pasteur de Garches, de l’Institut Pasteur de Paris, de l’Office international des épizooties ; membre des Académies vétérinaire, de médecine, des sciences ; il recevra de nombreuses distinctions et prix dont : docteur honoris causa de l’Université de Toronto, Grand Croix de la Légion d’honneur, médaille d’or du CNRS… Il a laissé une œuvre considérable qui a influencé durablement, et certainement encore actuellement, la prévention et le traitement de maladies infectieuses majeures de l’homme comme la diphtérie ou le tétanos.
Hervé Bazin, L’histoire des vaccinations, John Libbey-Eurotext, 2008, 471 p. (éd. anglaise augm., Vaccination : a history, John Libbey-Eurotext, 2011, 548 p.) ; - Gaston Ramon, Quarante années de recherches et de travaux, Toulouse, Impr. régionale, 1957, 911 p. ; - Institut Pasteur, Hommage à Gaston Ramon, Paris, Impr. nationale, 1970, 80 p. Ill. Timbre de G. Ramon, émis en 1967 à son effigie à l’occasion du deuxième centenaire de l’Ecole nationale vétérinaire d’Alfort.