Le samedi 17 mai 1113 , l’abbaye de La Ferté est fondée, selon la date traditionnelle, avec l’appui des évêques de Chalon, Gautier de Couches, et de Langres, Joceran, sous les auspices d’Étienne Harding, abbé de Cîteaux, parti la veille de son monastère avec onze moines profès. Après des débuts difficiles, l’accroissement numérique des religieux du « Nouveau monastère » autorisait et rendait même inévitable une première division de la famille cistercienne, séparation matérielle mais qui ne brise pas la communion spirituelle des deux établissements monastiques, liés par le sentiment unissant une mère à sa fille. La Ferté est sise au bord de la Grosne, dans le massif forestier du Bragny semblable à celui de Cîteaux, grâce notamment à des donations antécédentes du comte Savary de Vergy et de son fils Guillaume. La concession de la pleine propriété et de tous les droits d’usage dans cette grande forêt comtale permet aux moines de borner leur domaine de croix, en signe de limite de propriété, sous peine d’excommunication établie par ban. Venus du Charolais et de l’Autunois, les moines de La Ferté sont dirigés par l’abbé Philibert, soit Bertrand ou Bertaud selon le diminutif bourguignon. De taille modeste encore, le premier monastère est centré sur l’église abbatiale, qui est dédicacée et consacrée selon le calendrier traditionnel le dimanche 18 mai 1113. La date réelle n’est pas connue avec certitude, dans la mesure où les documents diplomatiques relatifs à la fondation sont largement postérieurs. La pancarte comportant la notice de fondation de La Ferté est certes rédigée avant 1158, mais elle date probablement des environs de 1150. Les premiers temps sont consacrés à la gestion de la communauté et à l’extension du domaine, par le moyen notamment d’un moulin sur la Grosne, de terres à Saint-Ambreuil, d’un vignoble à Mellecey ou du village de Nully. L’abbaye se constitue un patrimoine important, soutenu par les comtes de Chalon, qui la choisissent comme lieu de sépulture. Moins célèbre que celle de ses consœurs Clairvaux ou Morimond, La Ferté donne le branle à une filiation réduite mais notable, de Tiglieto en Lombardie à Maizières en Bourgogne.
Marlène Hélias-Baron, « La chronologie des quatre premières filles de Cîteaux : La Ferté-sur-Grosne, Pontigny, Clairvaux et Morimond », Hypothèses 2003 : travaux de l’École doctorale d’histoire de l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne, 2004, p. 181-194 ; - Recueil des pancartes de l’abbaye de La Ferté-sur-Grosne, 1113-1178, éd. Georges Duby, Gap, 1953 ; 2ème éd. Bruxelles, de Boeck univ. 2000, 260 p. (« Bibliothèque du Moyen Âge », 17).