Né à Nevers le 15 septembre 1885, Maurice Locquin passe son enfance au hameau de Baugy dans la commune de Balleray, un des endroits les plus paisibles de la campagne nivernaise. De la maison familiale, adossée à une colline boisée, la vue s’étend sur des pâturages peuplés de robustes bestiaux. Maurice assistait en observateur attentif à tous les travaux des champs ; il s’en pénétrait et en recevait une empreinte ineffaçable. À quatorze ans, il quitte Baugy pour Nevers, intègre le lycée de Nevers et est reçu au baccalauréat de lettres-mathématiques en 1903. Il passe ses vacances en compagnie du peintre André Lhote, qui vient se reposer chez ses tantes dans la capitale nivernaise. Si Jean, un de ses frères, se destine à l’histoire de l’art et à une carrière politique (il fut député de la Nièvre de 1914 à 1932), Maurice veut être peintre. Devant sa volonté d’embrasser une carrière artistique, son père l’inscrit à l’École municipale des arts, où il prend ses premières leçons de dessin et de peinture sous la direction de Léon Legendre. Après son service militaire, il se rend à Paris et suit quelques mois les cours de l’École des arts décoratifs. Mais il s’écarte rapidement de tout ce qui est académique et officiel. S’il fréquente l’École des beaux-arts, c’est pour y suivre, comme auditeur libre, les cours d’anatomie plastique de Paul Richer. Sur les conseils de ses camarades, notamment de son ami, Maurice Rétif, il entre dans l’atelier de Marcel Béronneau, où il reste trois ans. Finalement c’est dans l’atelier du maître Bernard Naudin qu’il réalise des progrès importants, particulièrement dans l’art du dessin. Multipliant les aquarelles, les gravures sur bois et quelques sculptures, il participe, en 1911, à la 9e exposition du Groupe d’émulation artistique du Nivernais, créant même l’affiche et le dessin pour la couverture du catalogue. Au cours de cette période, il voyage un peu, découvre les musées italiens, fréquente les artistes cubistes, en compagnie d’André Lhote et de Favory. Ce dernier le cite régulièrement dans sa correspondance au bibliothécaire Raoul Toscan, vantant la qualité de son travail artistique. En 1913, il expose, au Groupe, le buste en plâtre du poète Jules Boisville ; en 1914, celui de l’homme de lettres Jean Gromolard. Il propose de nombreuses vignettes et dessins pour les catalogues de ces expositions. Il réalise plusieurs bois gravés pour Le Boudoir aux récits de Raoul Toscan.
L’ordre de mobilisation lui parvient alors qu’il séjourne à Louvain. Il rejoint précipitamment à Nevers son régiment, le 213e de ligne, qui devait être dirigé sur la Haute-Alsace. Il combat pendant plusieurs mois dans la région de Thann et d’Hartmannswiller, sans que cela l’empêche de prendre son crayon dès qu’il a un instant de loisir. Dans la nuit du 22 au 23 juin 1915, il est désigné, avec sept autres camarades, pour une patrouille qui est prise dans le feu d’une mitrailleuse ennemie. Atteint d’abord au pied, Maurice Locquin reçut, en tombant, deux balles dans la tête. Il est enterré à quelque distance et repose depuis 1920, dans la nécropole nationale de Sondernach (Alsace), où sa tombe porte le numéro 380. – JFL
Jules Boisville, « Maurice Locquin peintre », Ombres et formes, déc. 1913, p. 271-276 ; - Paul Ginistry, Les artistes morts pour la Patrie (août 1914 – décembre 1915), préf. M. A. Dalimier, Alcan, 1916, p. 38-40 ; - En souvenir des nôtres (1914-1918), exposition, Nevers, Groupe d’émulation artistique du Nivernais, 1918 p.43-48 ; - Francis Guyonnet, « Maurice Locquin », Le Charitois, 6 nov. 1954.