Jean Marie Ferdinand Sarrien naquit à Bourbon-Lancy (Saône-et-Loire) le 15 octobre 1840 d’un père tanneur et d’une mère au foyer. De son enfance, on ne sait peu de chose si ce n’est qu’elle se fit au contact d’une population plutôt modeste. Après avoir effectué sa scolarité à Moulins (Allier), il poursuivit des études de droit, fut reçu avocat à Paris en 1863 et fut inscrit comme avocat au barreau de Lyon en 1864. En 1870, avec le grade de capitaine, il combat les troupes prussiennes. Il est de la célèbre bataille de Nuits-Saint-Georges, où il est blessé. Il obtint à cette occasion le grade de chevalier de la Légion d’honneur. À la suite de l’installation de la IIIe République et des bouleversements démocratiques inhérents, Louis Sarrien, le père de Ferdinand, devint, début 1871, maire de Bourbon-Lancy, magistrature qu’il n’eut guère le temps d’exercer puisqu’il décéda en août 1871. Ferdinand devint maire à sa place et fut même élu, quelques semaines plus tard, conseiller général du canton de Bourbon-Lancy. Destitué de son mandat de maire en 1873 à la suite des lois permettant à l’exécutif de nommer les maires, il n’en conserve pas moins son mandat de conseiller général. Il fut constamment réélu à ce poste et devint même président du Conseil général de 1889 à sa mort. Élu député de la 2e circonscription de Saône-et-Loire en 1876, il fait partie des premiers signataires du « Manifeste des 363 » qui s’offusquent de la nomination du duc de Broglie par Mac-Mahon. Cela lui vaut d’être à nouveau démis de son mandat de maire qu’il avait repris lors des élections de 1876, mais il est réélu maire en 1878. Mac-Mahon démissionnant de son mandat présidentiel, Sarrien devient un homme politique d’envergure. En 1885, il est ministre des Postes, en 1886, ministre de l’Intérieur : c’est lui qui mit en application la loi d’expulsion des familles ayant régné sur la France. Il signa, le 13 juillet 1886, le décret d’expulsion du duc d’Aumale et du comte de Paris. Il demeure ensuite à l’Intérieur ou à la Justice. Il ordonne la réouverture de l’Affaire Dreyfus en demandant une révision du procès. Quittant pour quelque temps le pouvoir, il n’en reste pas moins aux affaires, siégeant au Palais Bourbon et étant le président du Bloc des Gauches. Le 10 mars 1906, le président Fallières le nomme président du Conseil et le charge de former un gouvernement ; il appelle entre autres Clemenceau, dont c’est le 1er poste, Poincaré, Doumergue, Aristide Briand, et il s’octroie également la fonction sensible de garde des Sceaux. C’est par ce truchement qu’il va permettre de clore honorablement l’affaire Dreyfus. En juin 1906, il fait amnistier Dreyfus et lui permet de réintégrer l’armée avec le grade de commandant. Ce gouvernement est aussi à l’origine du repos hebdomadaire dominical obligatoire ! C’est également durant son gouvernement qu’une femme, Marie Curie, accède pour la première fois à une chaire universitaire. Parmi les grandes actions menées par le cabinet Sarrien, on retiendra également les inventaires des lieux de culte, menés posément mais avec efficacité et fermeté. Le 19 octobre 1906, Sarrien abandonne son poste à la suite de graves problèmes de santé. Clemenceau, qui ne l’aimait guère (« Ça rien ! Tout un programme ») lui succède. Sarrien décède à Paris le 28 novembre 1915 et est inhumé à Bourbon-Lancy. Un buste à sa mémoire fut érigé en 1933. Le collège de la ville porte son nom.- PhM
Hubert Louis, «De Bourbon-Lancy à Matignon, Ferdinand Sarrien, un ferme républicain », Les Échos du passé, n°67, 1991, p. 25-30, ill.