Elle est marquée par l’incertitude politique, les fluctuations des engagements des personnalités comme de l’opinion publique. Débutant par une tentative de rétablissement de l’Empire, elle s’achève avec une nouvelle occupation dite autrichienne dans les quatre départements bourguignons. Le régime politique peu convaincant de la Restauration, la méfiance à l’égard de l’entourage du roi Louis XVIII expliquent l’accueil favorable du retour de l’Empereur dans les villes par les patriotes ainsi que dans les campagnes. Bien des bourgeois attachés aux idéaux de 1789, bénéficiaires des acquis de la Révolution française puis de l’Empire se tournent de nouveau vers Napoléon Bonaparte. L’évêque de Dijon, Mgr Henri Reymond, le rallie également. Débarqué le 1er mars 1815 à Golfe-Juan, Napoléon rejoint très rapidement la capitale et effectue une traversée triomphale de la Bourgogne ; si la ville de Mâcon marque une certaine réserve le 13 mars, les autres cités sont pavoisées du drapeau tricolore : Chalon-sur-Saône, Autun, Avallon. Le 17 mars, Napoléon couche à la préfecture d’Auxerre, retrouvant là son statut impérial et reçoit le lendemain le maréchal Ney qui fait allégeance. Pour contrer la réaction monarchique intérieure et lutter contre les puissances étrangères qui tiennent congrès à Vienne, il faut recomposer une armée et faire appel aux volontaires. Très vite, les gardes nationales de Côte-d’Or et de Saône-et-Loire recrutent en nombre et sont prêtes à repousser les troupes royalistes qui remontent la vallée du Rhône. Le décret du 22 avril 1815 organise les corps francs chargés de la défense dans les départements frontaliers, « les hommes de bonne volonté » qui s’enrôlent, s’arment et s’équipent à leurs frais car les fonds publics sont défaillants. Ils n’ont pas tous eu l’efficacité du lieutenant-colonel Augustin Pelletier de Chambure, commandant d’un corps franc de volontaires côte-d’oriens. Les Bourguignons sont particulièrement sensibles aux termes du pacte fédératif publié le 30 avril par les Bretons : les principes libéraux sont conjugués à la volonté de défendre la patrie ; « Vivre libre ou mourir », l’affirmation est peu prisée par le régime impérial qui se réorganise mais ne peut rejeter ces soutiens. Une délégation de la fédération du Rhône est reçue avec force banquets le 16 mai à Dijon et le 21 à Chalon-sur-Saône. Les Bourguignons approuvent l’Acte additionnel aux Constitutions de l’Empire lors du plébiscite du 1er juin, en vain, car les armées alliées sont passées à l’action et mettent en déroute l’armée impériale à Waterloo le 18 juin. La seconde abdication de Napoléon 1er, le 22 juin n’épargne pas au territoire une nouvelle invasion, beaucoup plus douloureuse pour les populations : destructions, réquisitions abusives, arrestations sont menées par des soldats bavarois, wurtembergeois, hessois et autrichiens dans toute la Bourgogne jusqu’à la fin de l’année. Dans la plaine dijonnaise, le 5 octobre, les monarques de la Sainte-Alliance (l’empereur d’Autriche François 1er, le tsar de Russie Alexandre 1er, le roi de Prusse Frédéric Guillaume), de très nombreux princes et le duc de Wellington, vainqueur de Waterloo, assistent à une grande revue militaire : 130 000 soldats font une démonstration de leur toute-puissance durant laquelle « le village de Saint-Apollinaire a été pris et repris selon toutes les règles de l’art ». Le retour de Louis XVIII provoque une très forte épuration dans tous les corps administratifs et judiciaires. L’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon n’est pas épargnée. Pour échapper aux procès, de nombreux Bourguignons se retirent à la campagne ou s’exilent. – EL
Paul Gaffarel, « La seconde Restauration et la seconde occupation autrichienne à Dijon (juin-décembre 1815) », Mémoires de la Société bourguignonne de géographie et d’histoire, t. 12, 1896, p. 191-339.