Par lettres patentes de février 1768, le roi Louis XV accorda à Georges-Louis Leclerc de Buffon l’autorisation d’établir une forge sur le cours de l’Armançon, en la terre domaniale dont il portait le nom et qu’il avait rachetée à son père, avec tous ses domaines du Montbardois, en 1733. Quatre ans plus tard cette terre serait érigée en comté en remerciement des services rendus au royaume par la création, le développement et le rayonnement du Museum d’histoire naturelle de Paris et la publication, à partir de 1749, de l’Histoire naturelle, en partie élaborée en sa demeure de Montbard.
La construction de la forge était l’aboutissement d’une longue réflexion et de recherches sur les propriétés des métaux. Celles-ci avaient été menées grâce à l’appui d’Edme de Rigoley, directeur de la forge d’Aisy-sur-Armançon (Yonne), située à une dizaine de kilomètres au nord de la terre familiale. Pour s’assurer l’approvisionnement en minerai de fer, il avait conclu un accord avec le président de Rochefort, propriétaire de ladite forge d’Aisy, pour son extraction sur le site d’Étivey (Yonne) et avait acquis divers terrains qu’il savait riches en minerais. Son objectif était en outre économique : il avait pour but, en homme d’affaires, d’exploiter dans les meilleures conditions les ressources de ses domaines, en particulier les bois.
L’autorisation royale obtenue, les travaux furent menés bon train : la production débuta dès 1769, la construction des bâtiments s’étant achevée en 1772, le tout avec l’assistance de divers experts, dont l’ingénieur de la province, Thomas Dumorey, le chimiste et métallurgiste Gabriel Jars et, pour l’architecture, l’architecte Edme Verniquet. Ainsi fut créée l’une des plus importantes usines métallurgiques de la province de Bourgogne conçue pour assurer en un même lieu les étapes successives de la production du métal. Elle réunissait sur un seul site un haut-fourneau, une forge à deux feux et deux marteaux hydrauliques, une fenderie, une double batterie de tôle, deux bocards (pour concasser le minerai) et des lavoirs à bras.
Dans un souci de cohésion, avaient été bâtis à proximité des bâtiments industriels les logis du régisseur, de divers commis et de Buffon lui-même, ceux des ouvriers, des granges, magasins et écuries. Gérée par Buffon personnellement de 1768 à 1777, la forge, devenu véritable laboratoire de recherche, connut alors un grand rayonnement. Confiée ensuite à des régisseurs et objet de contestations de la part des grands propriétaires voisins, elle ne tarda pas à péricliter. Après la mort de Buffon, en 1788, et la mort de son fils unique, guillotiné en 1792, elle connut une alternance d’activité et de sommeil, jusqu’à l’introduction de modifications par l’association des maîtres de forges chatillonnais Bazile-Louis-Maître, qui lui donna une nouvelle impulsion, que devait favoriser l’ouverture du canal de Bourgogne, par lequel pouvait être acheminée la houille d’Épinac. Passée ensuite en diverses mains, plusieurs fois adaptée aux nouvelles techniques, elle cessa définitivement de fonctionner en 1866 et fut convertie en fabrique de ciment entre 1868 et 1872. Toute activité industrielle y a cessé en 1923. Propriété privée, elle appartient à la même famille depuis 1866.
L’ensemble des bâtiments a été classé Monument historique entre 1943 et 1985. À partir de 1978, des travaux de sauvegarde et de mise en valeur ont été entrepris, avec l’appui des propriétaires et, durant les premières années, la collaboration active de l’Association pour la sauvegarde et l’animation des forges de Buffon. Elles sont ouvertes au public d’avril à octobre.
Bernard Rignault, « Les forges de Buffon », Mémoires de la Commission des antiquités du département de la Côte-d’Or, t. 27, 1970-1971, p. 209-225, ill. ; - La Grande Forge de Buffon : historique et guide de visite, Association pour la sauvegarde et l’animation des forges de Buffon, 1990, 112 p., ill.