De souche normande, Charles Oursel naît le 2 mars 1876 à Saint-Philibert-sur-Risle (Eure). Entré à l’école des Chartes en 1895, il en sort avec une thèse sur la Réforme en Normandie au temps de François 1er. Nommé bibliothécaire-adjoint à la Bibliothèque municipale de Dijon le 18 juillet 1899, il en prend la direction le 27 juillet 1904. En 1926, il est chargé des fonctions de conservateur en chef de la Bibliothèque universitaire. Il gère aussi les archives municipales, qu’il remet en ordre et dont il rédige l’inventaire avec son adjoint. Chargé en 1920 du cours d’histoire de l’art en Bourgogne à la Faculté des lettres, il poursuit jusqu’en 1948 cet enseignement qu‘il complète par des excursions. À sa retraite en 1942, ses pairs lui font l’hommage d’un volume de mélanges Autour d’une bibliothèque. Soucieux des affaires de la ville, il siège au conseil municipal de 1947 à 1959 où il aura l’occasion de passes d’armes avec le chanoine Kir. Il meurt le 26 janvier 1967 à Cluny où il s’est retiré quelques années auparavant.
Sitôt responsable de la bibliothèque, il entreprend la modernisation indispensable des moyens de recherche, accroît les collections au profit des usagers et en fait un établissement modèle. À force d’insistance il obtient en 1910 l’affectation à la bibliothèque de la chapelle du collège des Godrans qu’il aménage en salle de lecture en remplacement de celle en usage jusqu’alors, « vieillotte, miteuse et poudreuse » ; elle n’a guère changé depuis. Il ne ménage pas non plus ses efforts en vue de développer la lecture publique mais ne parviendra pas à ses fins faute d’obtenir un local.
Convaincu de l’utilité d’une concertation nationale et de la nécessité d’organiser le corps des bibliothécaires, il fait partie, dès leur création, respectivement en 1906 et 1909, du comité de l’Association des bibliothécaires français et de la Commission supérieure des bibliothèques. Afin de remédier au système « archaïque, anarchique et nocif » qui soumet au bon vouloir des élus locaux les bibliothèques municipales, souvent riches de documents précieux, il réclame avec insistance diverses mesures qu’il regroupe et complète dans le rapport de synthèse qu’il rédige à la suite du questionnaire élaboré par lui et diffusé en 1919 par l’Association des Bibliothécaires Français. Ce rapport préconise la création d’une direction des bibliothèques rattachée à la Bibliothèque Nationale, la nationalisation des bibliothécaires municipaux, l’institution d’un cadre unique, la réforme du dépôt légal de manière à ce qu’un exemplaire des publications reste en province, le développement du prêt inter-bibliothèques avec franchise postale et la généralisation des sections de prêt. Un certain nombre de ces propositions seront reprises dans la loi sur les bibliothèques du 21 juillet 1931, en faveur de laquelle il multiplie les démarches auprès des pouvoirs publics.
Sur le plan local, il participe à de nombreuses associations et devient rapidement une des personnalités majeures de la vie culturelle. Dès 1914 il contribue à la création de l’Association Bourguignonne des Sociétés Savantes et en sera un partenaire influent. Élu membre résidant de l’Académie en 1901, il accède à la présidence en 1934. Ses nombreux travaux lui valent, jusqu’à l’étranger, une réputation flatteuse et justifiée de savant érudit. Il consacre des articles très documentés notamment à des personnages bourguignons ou à des événements de l’histoire locale, et publie diverses études fondamentales, qui restent des références : La miniature du XIIe siècle à l’abbaye de Cîteaux d’après les manuscrits de la Bibliothèque de Dijon (1926), ouvrage complété en 1960 par un album illustré ; L’art roman de Bourgogne (1928) ; L’église Notre-Dame de Dijon (1938) ; L’Art de Bourgogne (1953) honoré d’un prix de l’Académie des Beaux-Arts. Son goût pour l’art roman l’amène à s’intéresser particulièrement à Cluny, à suivre passionnément les fouilles et recherches du professeur Conant sur cette abbaye prestigieuse et à entretenir des échanges fructueux avec le savant archéologue américain. En 1949, il sera l’une des chevilles ouvrières de l’organisation du Congrès scientifique de Cluny puis de la publication des Actes.
P. Gras, « Charles Oursel », Mémoires de l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon, t. 119, 1966-1969, p. 15-29.