Au nom d’Aloysius Bertrand (1807-1841) reste indissolublement lié le titre de Gaspard de La Nuit, maître livre avorté où le romantique dijonnais invente le genre du poème en prose. C’est ce haut fait que célébrèrent à l’envi Baudelaire, Mallarmé, Villiers de l’Isle-Adam, Théodore de Banville, Huysmans, André Breton, Max Jacob ou Maurice Ravel ; devrait-il faire oublier que Bertrand se voulut aussi dramaturge, que son œuvre comporte non moins de six pièces de théâtre, complètes ou inachevées ?
Jacques-Rémi Dahan propose un parcours de ce territoire méconnu, à l’occasion de la publication de l’ultime grand texte inédit de Bertrand : après deux moutures qui ne trouvèrent pas grâce auprès du théâtre Comte et du théâtre de la Gaîté, la troisième version fut soumise au printemps de 1837, sous le titre de Daniel, à l’influent directeur de la Porte Saint-Martin, qui l’écarta courtoisement. C’est cet unique drame de Bertrand, jamais représenté, qui sera le terme de l’odyssée.