Antiquaire et visionnaire à la fois, c’est possible ! Pour preuve, Jules Jean Chevrier, né à Chalon-sur-Saône le 5 février 1816, de Claudine Joséphine Laurent et de Claude, commis négociant qui fonda cinq ans plus tard une maison de tissus en gros et confection rapidement fameuse. Au collège, il se lie d’amitié avec François Fertiault (Célébrations, 2014 p. 90). En 1844, il est l’un des fondateurs de la Société d’histoire et d’archéologie de Chalon.
Son père décédé en 1849, il rejoint à Paris l’atelier de Thomas Couture (qui forma Pierre Puvis de Chavannes) ; Chevrier est surnommé « le peintre des rats », tant il parsème ses tableaux de ces rongeurs. En 1851, preuve de la réussite commerciale familiale, il achète l’hôtel dit « de Roger Thomas » (aujourd’hui le Prisunic place de Beaune) ; l’année suivante, il est élu conseiller municipal puis 2e adjoint et il crée la Société des amis des arts. Il conduit excellemment des fouilles archéologiques à Saint-Jean-des-Vignes, à la Grange-Frangy… En 1861, il découvre les instruments de Nicéphore Niépce et s’attache désormais à rendre à celui-ci toute son œuvre. En 1863, il devient 1er adjoint. Directeur du musée Denon, il le réorganise avec succès et reste à ce poste jusqu’à son décès survenu à Farges-lès-Chalon le 15 octobre 1883. Par son testament, il lègue à la ville de Chalon plus de 600 objets, assez hétéroclites, mais dont beaucoup d’antiquités chalonnaises, résultat de son « incurable manie du collectionneur », et aussi « de cette fièvre qui fait aimer la couleur locale » selon ses aveux en préface de son Chalon pittoresque et démoli signée le 4 février 1882 (rééd. Marseille, Jeanne Laffitte, préf. P. Chenu, 1981). Éditer ses croquis, dont certains conservés depuis le collège, accompagnés des textes de ses amis : sonnets de Fertiault, notes de Léopold Niepce, Marcel Canat, Albel Jeandet (Célébrations 2016, p.) était « faire œuvre de sauvetage » et aussi dénoncer un urbanisme au cordeau avec « des rues pareilles, alignées de maisons semblables, des hauteurs ordonnancées et des saillies réglementaires : l’uniformité partout, le froid ennui toujours »…
Claude Elly, « Jules Chevrier (1816-1883) », Mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de Chalon-sur-Saône, t. 53, 1984, p. 151-158 ; suivi de Louis Bonnamour, « Jules Chevrier archéologue et précurseur », p. 159-170 et de 12 dessins, « Exploration de la vallée des Vaux », p. 171-177.