A l’issue de la Grande Guerre, de nombreuses familles expriment le désir de récupérer les corps de leurs soldats morts au champ d’honneur pour les inhumer dans le cimetière familial aux côtés des ancêtres. Mais elles se heurtent au refus de l’État dont la priorité est de « nettoyer » les champs de bataille, comptabiliser les morts, les identifier et les inhumer dans des cimetières militaires. Cette interdiction suscite de vives réactions, certains endeuillés n’hésitant pas à outrepasser la loi et à procéder à des exhumations clandestines.
Face à la pression des familles et de l’opinion publique, l’État finit mettre un terme à cette interdiction et à rendre les morts. En effet, par l’article 106 de la loi de finances du 31 juillet 1920, il accorde le transfert des corps, à ses frais, aux ascendants et descendants qui en feraient, la demande, des corps des militaires et Marins morts pour la France entre le 2 août 1914 et le 24 octobre 1919. Se met alors une vaste opération de restitution orchestrée par l’État et gérée par des entrepreneurs privés, donnant ainsi naissance à un véritable ballet des morts. Comment s’est déroulée cette démobilisation des morts ? Comment une affaire privée, la perte d’un être cher, devint une affaire d’État, sachant que certains entrepreneurs n’hésitèrent pas à recourir à des pratiques frauduleuses dans le seul but de s’enrichir ? Tel est l’objet de la communication.