Commission des sciences économiques et sociales
« L’histoire de la peine est celle d’une constante abolition ».
( Rudolf Von Jhering )
A la fin du XIXe siècle, cette affirmation était à la fois un constat et une prédiction. Un constat, puisque depuis l’époque moderne les peines et leur exécution s’étaient adoucies. Le siècle suivant allait abolir la plus définitive et symbolique d’entre elles : la peine de mort. Du moins pour l’Europe…
La prédiction de Rudolf Von Jhering va-t-elle s’appliquer à la peine d’emprisonnement. Sera-t-elle finalement abolie ? Pas encore, certes. Pourtant, la peine d’emprisonnement n’est-elle pas de fait en voie de l’être, « abolie », par une lente, mais certaine, évolution de son inexécution? À l’instar de celles qui, au fil du temps, ont peu à peu disparu ?
Parmi celles-ci, la peine de déportation a sanctionné des infractions politiques comme de droit commun aux dix-huit et dix-neuvièmes siècles. Cet exemple historique nous montre les « vicissitudes » de la peine de déportation depuis son introduction par le code pénal de 1791 jusqu’à la loi du l8 juin 1850 en passant, notamment, par son inexécution totale ou encore par les diverses substitutions par une autre peine, jusqu’à sa disparition formelle par l’ordonnance 60-529 du 4 juin 1960 abrogeant cette dernière loi.
Aujourd’hui, aux termes des lois répressives en vigueur, les crimes et la quasi-totalité des délits sont punis de peines privatives de liberté, de la prison et/ou d’amendes, alors que paradoxalement, pour les délits, le tribunal correctionnel est soumis à de strictes conditions pour pouvoir prononcer une peine d’emprisonnement « ferme ». Pourtant, même ainsi prononcée, la peine d’emprisonnement n’est pas toujours exécutée en « prison ». De nombreuses dispositions de droit ou de multiples obstacles de fait vont, en effet, empêcher son exécution, partielle ou totale, qui devrait être, en toute logique, l’emprisonnement du condamné pour la durée prononcée par le tribunal.